Encore une critique de Jusqu’à ce que la mort nous sépare !

Critique d’Ondine Marin parue dans Le Souffleur le 13 décembre 2019

La Compagnie Libre d’Esprit présente une comédie, Jusqu’à ce que la mort nous sépare, de Rémi De vos au théâtre de l’Epée de Bois jusqu’au 22 décembre.

Simon, en fils prodigue, retrouve sa mère à l’occasion funeste de la crémation de sa grand-mère. Alors qu’ils vont répandre les cendres, Simon croise son amour de jeunesse. Lors d’un rapprochement propice à un baiser, la jeune femme lâche l’urne qu’elle tenait entre les mains et la brise. La scénographie toute de bois permet de concentrer les pirouettes argumentaires et gestuelles les plus extravagantes des deux complices autour d’une petite table flanquée d’une chaise avec un dossier sur lequel se découpe un cœur. 

L’intrigue amoureuse d’une promesse de mariage – Jusqu’à ce que la mort nous sépare – couvre l’intrigue funèbre de l’urne cinéraire brisée. Cette pièce, aux allures de Vaudeville, permet aux comédiens de la Compagnie Libre d’Esprit, friande des humours de Václav Havel, de Nino Noskin ou encore d’Ionesco, d’explorer les ressorts comiques de la pièce. 

Deux types de soliloques encadrent les scènes principales. L’un prend la forme de confessions autobiographiques, en pleine lumière, quand le deuxième, plus expéditif, dans une lumière en douche intimiste, ponctue la pièce de messages laissés sur le répondeur du bureau de notre protagoniste. Ils rompent avec le fil rouge du registre comique, et semble-t-il, avec l’unité de jeu alors que le reste de la pièce est joué sur un rythme très enlevé.  

Le texte, écrit dans une économie de mots, se construit sur de nombreuses répétitions, les répliques se disant presque en miroir les unes des autres. Elles expriment ainsi le malaise et le fardeau des explications dont chacun se décharge sur l’autre. Tout repose ainsi sur l’interprétation : les mimiques gênées des deux complices, glissant de la timidité amoureuse vers la culpabilité partagée – avec le regard maternel suspicieux pour témoin. C’est par des regards offusqués, les démarches crispées illustrant l’émotion contenue des personnages, que les explications les plus rocambolesques jaillissent. D’extravagance en extravagance, l’urne est maintenue, par des gestes farfelus, à l’écart de la mère. Dans un jeu de passe-passe, elle voyage, du caddie de course vers le frigidaire, pour finir sur la table à manger avant de disparaître. Le jeu avec le caddie contenant l’urne brisée, entre lequel Simon s’interpose, est particulièrement réussi. Il obéit à l’organisation spatiale où se dessinent les alliances et les oppositions organisées entre les trois personnages.

Le jeu comique des comédiens est très fin et tient sur la durée qui mène à l’hilarité de l’humour noir de la pièce, cependant les soliloques aux allures de confessions semblent presque superflus.